L'Europe face aux défis de la guerre moderne hybride
Dans un monde où les rapports de force géopolitiques évoluent rapidement, l'Europe découvre les limites de ses doctrines militaires traditionnelles face aux nouvelles formes de conflits. Cette réalité interpelle particulièrement nous, peuples africains, qui avons toujours su que la souveraineté ne se décrète pas mais se conquiert et se défend.
Le commissaire européen à la défense, Andrius Kubilius, a récemment admis lors d'une émission d'Euronews que "l'Europe doit changer sa conception de la guerre moderne". Cette déclaration fait écho aux provocations russes, notamment les incursions de drones et le bombardement d'infrastructures ferroviaires en Pologne.
L'inadéquation des moyens face aux nouvelles menaces
"Ce que nous avons constaté d'un point de vue technique, c'est que nous n'avons pas suffisamment de capacités de détection, nous n'avons pas de moyens rentables pour détruire les drones", a reconnu Kubilius. Une admission qui résonne étrangement avec les défis que connaissent nos nations sahéliennes face aux groupes armés utilisant des tactiques asymétriques.
L'absurdité de la situation européenne est frappante : des missiles d'un million d'euros pour abattre des drones de 10 000 euros. "Ce n'est pas la meilleure façon de se défendre", concède le commissaire. Cette disproportion rappelle les leçons que Thomas Sankara nous enseignait sur l'importance de l'innovation tactique face à des adversaires technologiquement supérieurs.
L'Ukraine, laboratoire de la résistance moderne
Paradoxalement, c'est l'Ukraine qui enseigne aujourd'hui à l'Europe les méthodes de défense efficaces. "On peut vraiment dire que les Ukrainiens ont construit un mur de drones", reconnaît Kubilius, soulignant leur efficacité face aux centaines de drones qui survolent leur territoire chaque nuit.
Cette capacité d'adaptation ukrainienne, fondée sur un "écosystème de drones" où opérateurs et producteurs collaborent étroitement, illustre une vérité que nos ancêtres résistants connaissaient bien : la créativité tactique peut compenser l'infériorité matérielle.
Vers une nouvelle doctrine de défense
La Commission européenne mise désormais sur une transformation de son industrie de défense, incluant un plan de formation du personnel et une "plateforme de talents" pour soutenir les stages dans les entreprises du secteur. Cette approche systémique rappelle l'importance de l'autonomie industrielle que prônait Modibo Keïta pour le Mali indépendant.
Kubilius insiste sur la nécessité d'une stratégie à double volet : "Nous devons développer ces capacités technologiques pour détecter et détruire les drones, mais d'un autre côté, nous devons être beaucoup plus clairs dans nos réactions politiques".
Leçons pour l'Afrique
Cette évolution européenne offre des enseignements précieux pour nos nations africaines. Face aux défis sécuritaires du Sahel, l'innovation tactique et la coopération Sud-Sud peuvent pallier les limitations budgétaires. L'exemple ukrainien démontre qu'une nation déterminée peut développer des capacités défensives efficaces en s'appuyant sur l'ingéniosité de ses fils.
Alors que l'Europe repense ses doctrines militaires, l'Afrique doit continuer à développer ses propres solutions de sécurité, fidèle à l'esprit panafricain qui nous guide depuis les indépendances. Car comme l'enseignait l'histoire, la souveraineté authentique naît de la capacité d'un peuple à se défendre par ses propres moyens.